Papiers dansés – Épisode 1

Après les courtes pièces pour les lieux d’accueil de la petite enfance, les spectacles Au bord de l’eau ou La danse des Bois, Véronique His poursuit son travail de recherche sensorielle. Une nouvelle création prend forme…

«Laissez parler les p’tits papiers… » Ce n’est pas en écoutant la chanson de Gainsbourg que Véronique His a imaginé son nouveau spectacle. « Ma première émotion remonte à deux ou trois ans, au Japon, une journée étonnante » confie la chorégraphe. « J’ai rencontré dans un village à une heure de Kyoto, une artiste qui travaillait le papier… J’ai éprouvé une sensation forte en découvrant un lien avec cette matière. » 

Cette intuition a été ravivée lors d’échanges avec Nicole Fellous (peintre et sculpteure) qui partage avec Véronique plusieurs week-ends de travail. « Dans un dialogue avec le papier, elle m’a proposé de laisser vivre le kraft blanc, d’écouter la réponse du calque, de froisser des papiers colorés… Tout était dans l’imprévu, dans des mouvements très vivants, laissant émerger des formes inattendues. J’ai finalement choisi le kraft blanc, pour sa texture… Tout résidait dans l’interaction : un travail se poursuit pour agir sur la matière, faire place au silence, écouter la réponse, maîtriser les gestes de cette conversation, abandonner toute volonté de maîtrise. » 

LA NAISSANCE D’UNE PARTITION

Nous sommes alors à l’aube du travail du prochain spectacle de la Compagnie La Libentère. Des résidences à Arcueil et Nevers (peut-être à Gennevilliers) vont émailler le chemin de création. Les idées s’additionnent et se croisent : le lancé d’un rouleau qui prend l’empreinte du corps, la traversée d’une feuille, l’action qui naît de la trace dans des énergies différentes amenant le danseur à piétiner, caresser avec les pieds, froisser avec les mains, traverser cette matière… Ce qui prend forme est plastique, éphémère, c’est la métamorphose qui se déploie. « La partition du spectacle sera jalonnée de verbes d’action dans un temps donné. En fonction des gestes qui se reproduisent et de la manière dont le danseur les apprivoise, se tisse la trame chorégraphique. Dans la perspective d’un déroulement, je pense à la naissance d’une chrysalide… Quant à la musique, elle est déjà là car le papier est sonore. La composition musicale se fera un nid, peu à peu, avec la guitare électrique comme instrument privilégié. » 

UNE EXPÉRIENCE DE LA MATIÈRE

Le spectacle Papiers dansés arrive tout naturellement avec le désir de Véronique His de poursuivre son travail de recherche sensorielle qu’elle mène en lien avec la petite enfance. « Les tout-petits peuvent emprunter, avec délicatesse et respect, leur propre chemin dans la matière. Les enfants de crèche et de maternelle seront associés à cette expérience, changeante et sonore. Le papier encore informe va prendre vie, ce sera la naissance d’une forme par l’intermédiaire du mouvement et du corps. » La lumière projetée donne du relief à la matière, un simple tapis de danse, le crissement des feuilles feront le reste, dans un espace grand ouvert à l’imaginaire. 

Véronique His construit maintenant le solo d’une traversée de papier, avec la danseuse Lilas Nagoya, et pense déjà à une suite, la création d’une performance pour trois danseurs, Îles de Papier, dans un challenge immédiat de trois regards croisés, visant l’épure. À vivre, dans un espace ouvert, un jardin, un centre d’art contemporain ou encore un musée, tous susceptibles de se laisser séduire par l’infini déroulement de ces matières bruissantes et évanescentes…

•HK