Nogent le Rotrou, Théâtre buissonnier

Les actions culturelles proposées par la compagnie sont à l’image de ce qui a toujours porté leurs créations : la culture populaire. La chanson nourrit à la fois les spectacles et toutes les activités tournées vers la petite enfance.

L’histoire du Théâtre Buissonnier est marquée par plusieurs étapes. C’est tout d’abord une troupe issue d’une pratique théâtrale à Authon du Perche. Le Théâtre auissonnier, créé en 1984, est alors un atelier du samedi après midi, l’école buissonnière des enfants et des adolescents en milieu rural. Fidèle à sa volonté première de travailler dans l’idée du théâtre populaire, la Compagnie du Théâtre Buissonnier favorise dès ses débuts la rencontre avec les publics les plus divers. Créée en 1992, l’association a pour objectif la pratique et la promotion des arts vivants et plus généralement tout ce qui favorise l’activité culturelle.
L’implantation à Nogent-le-Rotrou est l’expression du choix militant de faire vivre en milieu rural des projets artistiques populaires, c’est à dire à destination du plus large public possible. « D’ateliers en cours de théâtre, par l’université ou par les chemins de traverse, l’évidence s’est imposée à nous. Nos spectacles rencontraient un large public et nous avons opté pour le statut d’artistes professionnels. » Le Théâtre Buissonnier se professionnalise donc dès 1994 et s’installe alors à Nogent-le-Rotrou en 1999 dans une ancienne friche industrielle ; une salle de spectacles associative est aménagée, c’est La Verrière qui peut accueillir 120 spectateurs. Une centaine de bénévoles font partie de l’aventure. Le service culturel de la ville suit le projet et signe une convention. La structure se développe autour de trois axes principaux : une compagnie professionnelle tournée vers la création, qui joue de 50 à 80 représentations par an, dans toute le France ; des ateliers de pratiques artistiques proposés au sein de l’association, des interventions en milieu scolaire, parascolaire, médical… et une salle de spectacle, lieu de production, de création, et de résidence pour les artistes. 

« Locomotive de notre association, la compagnie du Théâtre Buissonnier a été et reste encore pour nous un engagement en direction de publics différents que nous n’avons jamais choisis, ni sélectionnés, tant est inscrite dans nos fibres artistiques la notion de culture populaire. Nous avons chanté et joué dans les rues, les festivals, les salles des fêtes, les champs de foire avec la même détermination que sur les planches ou sous des plans de feu. Plus de 600 dates, autant de villes et villages, de quartiers où au soleil dominical comme dans le noir des salles, les milliers de gens rencontrés ont cimenté en nous une part de richesse identitaire. De celles invisibles, que l’on porte en soi et qu’on tente ensuite de restituer, à chaque nouvelle rencontre, comme un échange perpétuel. De cela nous sommes faits mais aussi de ne pas nous installer dans la gestion d’une recette si bonne soit elle. Parallèlement aux Buissonniers nous avons voulu continuer d’inventer notre “ métier-vie “ et depuis deux ans, la compagnie présente d’autres spectacles, toujours autour de la chanson, mais dans d’autres univers ».
Les spectacles proposés puisent leur originalité dans un souci de création où se croisent la dynamique du spectacle de rue, le travail de comédien et l’univers de la chanson. Le groupe de comédiens-chanteurs Les Buissonniers sillonne la France entière en jouant plus de quatre cents fois Comme un air de fête. L’équipe qui constitue la Compagnie milite également par tous les moyens à la diffusion la plus large du spectacle vivant. Aux côtés de son frère Gilles Richard, directeur de la compagnie, Marie Sophie Denis Richard est là depuis la première heure. 

En Juillet 2004 un incendie détruit en totalité La Verrière et risque de réduire en cendres tous les efforts déjà accomplis. Les Buissonniers perdent presque tout, leur lieu de travail, leurs costumes, leurs instruments de musique, leurs décors, leurs livres d’or…

La troupe ne baisse pas les bras et créée en 2008 la BarAque, structure démontable faite de bois, d’acier et de toile qui est montée à Nogent le Rotrou mais voyage aussi au gré des tournées. Ce nouveau lieu de création et de représentation accueille toutes les formes des arts du spectacle avec un accent particulier sur la chanson…

Le Théâtre Buissonnier développe un programme d’actions culturelles. La compagnie s’investit dans l’animation d’ateliers de pratique artistiques pour les tout-petits, les enfants, les adultes, les scolaires, auprès d’établissements spécialisés, associations, organismes de formation… Des ateliers cirque, dessin, théâtre pour les jeunes et les adultes permettent aux participants de se confronter aux arts vivants sous toutes leurs formes. Un volet petite enfance se met en place.

Un programme qui se construit

Dès les années 2000, Marie Sophie Denis Richard travaille dans un lieu d’accueil petite enfance. De 2003 à 2005 elle suit plusieurs stages avec Enfance et Musique : La musique et le tout petit, Techniques d’animation, L’enfant son corps et la musique, Jouer avec les bébés, La musique dans les accueils parents enfants…

Parallèlement sur le terrain, Marie Sophie Denis Richard mène plusieurs actions. Elle intervient une matinée par semaine dans une école maternelle.

Depuis 2004, le Théâtre Buissonnier fait vivre une action d’éveil musical et culturel des tout-petits à Nogent le Rotrou.

Avec la conviction que l’expression musicale est un atout majeur de l’épanouissement du tout-petit, de son éveil et de son ouverture au monde, trois associations locales  se lancent dans une nouvelle dynamique artistique. Cette collaboration – qui se poursuit toujours – implique La Luciole un lieu d’accueil parents/enfants, la Farandole une association d’assistantes maternelles issues du Ram et le Théâtre Buissonnier. Depuis trois ans, des ateliers d’éveil musical mais aussi des rendez-vous comptines et chansons sont animés par Marie Sophie Denis Richard. Le programme « Chanter pour grandir » existe grâce au partenariat associatif qui lie les trois structures. Cette proposition en pays nogentais s’est enrichie d’actions de formation auprès des professionnels de la petite enfance. Ce « temps de sensibilisation » a été mis en place par la Communauté de Communes du perche en 2010. Ouverte aux personnels des crèches, aux assistantes maternelles, au personnel et bénévoles de l’association ADMR (Aide à Domicile en Milieu Rural), la formation a lieu dans les locaux du Ram à Margon. « L’éveil artistique n’est pas une activité de plus dans la vie du tout-petit mais un vecteur déterminant pour l’aider dans ses apprentissages et son appréhension du monde. Les expériences menées à Nogent le Rotrou ont montré combien la place de l’adulte référent (éducatrice, assistante maternelle ou enseignante) était déterminante aux côtés du tout-petit sur ce chemin musical et artistique.
Le temps de sensibilisation a pour objectif de donner aux professionnels des outils qui leur permettent de mieux accompagner l’enfant, de les aider à s’interroger sur l’environnement sonore du jeune enfant et de (ré)apprendre à jouer, imaginer, créer à partir d’une matière musicale. »

L’implication du Théâtre Buissonnier repose sur une cohérence des actions et une mise en place progressive de différents modes d’intervention. Le programme de formation – dispositif le plus récent dans les interventions – résulte d’une expérience de terrain patiemment établie. Chaque étape du travail trouve sa cohérence dans une réflexion globale d’accompagnement des enfants et des adultes qui les entourent.

Spectacles et ateliers comptines

Mettant à profit son expérience de la scène, Marie Sophie Denis Richard choisit de croiser les dimensions artistiques et pédagogiques. Me voici, te voilà est un spectacle créé en 2005 destiné aux tout-petits (de la naissance à cinq ans) et à leurs familles. Il est fait de  chansons, comptines, boîtes à musique et autres sons. On y trouve aussi des jeux de doigts et d’ombres. Marie Sophie Denis Richard s’est nourrie des ateliers, elle avait aussi envie de parler des questions de transmission, de mémoire. À la question, comment on retrouve des chansons, elle répond sous une forme scénique. « Les matins succèdent aux nuits, au rythme des jours et des mélodies. Réveils ensommeillés ou câlins, sommeils peuplés de rêves ou de grosses frayeurs, sont autant de prétextes à explorer l’enfance, ses mystères et ses joies. Les refrains du spectacle rappellent les rituels des journées enfantines. Les couplets des chansons en racontent les surprises et les découvertes, parfois inattendues. »

Me voici, te voilà se conjugue à deux, puis à trois. À deux comédiennes qui jouent, chantent et se découvrent. À trois, lorsque leur couple complice rencontre ses spectateurs et s’adresse à chacun d’entre eux, dans un échange dont l’intimité se renforce avec la pénombre. Des dizaines de représentation plus tard, la musicienne a décidé de créer un autre spectacle, elle conçoit Microsillons, proposition toujours très marquée par la chanson. Les tourne-disques sont comme des objets magiques, des chansons comme des trésors intimes, Microsillons est un chemin sur les traces de notre mémoire sonore et sensorielle.
Un cocon visuel et musical où l’électrophone est tour à tour, manège miniature, orchestre des petits bonheurs, madeleine aux parfums de vinyle. C’est un parcours à suivre comme une invitation, tant pour le tout petit que pour ses parents et les grands de la fratrie.

L’action d’éveil musical et culturel ne se limite pas aux structures petite enfance.

une pratique qui se met en scène

Elle est composée également d’ateliers qui encouragent une pratique amateur de la chanson et de la comptine. Destiné aux adultes, les ateliers comptines fonctionnent depuis 2005. Au rythme de dix séances annuelles, il s’agit d’un moment où chacun s’amuse à retrouver les chansons de l’enfance, les explore et y découvre toute la richesse du jeu et de l’imaginaire. Cet apprentissage a pour objectif de satisfaire le simple plaisir personnel mais aussi de favoriser le partage familial et professionnel.

Dès la deuxième année, émerge l’idée d’un spectacle, d’abord un gouter en chansons dans un quartier. Depuis 2006, l’atelier comptines qui compte aujourd’hui une quinzaine de chanteuses s’achève par une présentation de spectacle de rue à l’occasion de la fête de la musique. D’autres lieux sont prétexte à présentation publique comme le quartier des Gauchetières à Nogent le Rotrou, l’école du Plateau ou encore le théâtre de verdure pour la fête de la jeunesse. Ces représentations sont importantes, non seulement pour fixer un objectif au travail d’une année mais aussi pour communiquer au public l’envie de revisiter le répertoire des chansons. L’atelier prépare désormais chaque année sa prochaine fête de la musique et envisage les autres lieux de prestation possibles. Cette continuité dans le travail tisse des liens forts entre les participantes et réaffirme publiquement l’importance du chant dans une pratique individuelle et dans un partage avec les enfants.

Marie Sophie Denis Richard n’est pas au départ une spécialiste de la petite enfance. Elle a conjugué ses expériences théâtrales et musicales pour enrichir un parcours personnel et donner aux professionnels de la petite enfance une ouverture active sur le monde du spectacle. La chanson est un trait d’union entre ces deux univers, pour un enrichissement mutuel. ν  H.K.