Jeune femme dynamique, Noémie Haller enchaîne les interventions auprès des enfants des crèches, des écoles primaires et dans les écoles de musique des villes et villages de son département, la Côte-d’Or, pour transmettre sa passion pour la musique. Rattachée à plusieurs écoles de musique (Marsannay, Val-de-Norges, CRR de Dijon…), dont celle de Quetigny, cette « musicienne intervenante en milieu rural », comme elle se définit elle-même, a su trouver sa place en tant qu’intervenante mais ne cesse de se questionner pour mieux avancer.
Noémie Haller est violoniste altiste. Deux rencontres ont été décisives pour sa vie de musicienne professionnelle : celle avec son mari, professeur de violon, puis celle avec un dumiste (musicien ayant obtenu le diplôme universitaire de musicien intervenant) du conservatoire de Dijon qui menait un projet musical avec des enfants d’une école primaire, et auprès duquel elle découvre une autre façon de transmettre la musique.
Lorsqu’elle décide de devenir dumiste à son tour pour partager sa passion avec les enfants dont l’éducation l’intéresse fortement, Noémie Haller est professeure de violon à temps plein. Durant sa formation de deux ans au Centre de formation de musiciens intervenants de Lyon, elle a l’occasion de faire un stage à Barcelone où elle rencontre des musiciens espagnols qui travaillent auprès des tout-petits, notamment lors de séances parents-enfants. Ses échanges avec eux sont riches et lui donnent très envie de s’engager dans cette voie à son tour… Une offre d’emploi de l’école de musique associative de la ville de Quetigny tombe à point au moment où elle revient en Côte-d’Or en septembre 2005 ! Le directeur en place depuis deux ans cherche une musicienne pour mettre en œuvre un projet avec la Maison de l’enfant Maria-Montessori tout en donnant des cours d’éveil à l’école de musique. Noémie Haller se lance dans l’aventure et élabore un projet : travailler avec les tout-petits et les adultes qui les accompagnent autour de propositions de jeux musicaux. Il est question d’exploration, d’échanges sonores, de regards, de relations, de partage, et d’expression de la sensibilité de chacun.
Premières rencontres avec les jeunes enfants
Les cours d’éveil musical qu’elle reprend à l’école de musique se déroulaient sans les parents alors elle commence par faire de même. Mais très vite elle remarque que certains enfants sont sur la réserve, dans l’expectative, voire un peu inquiets, eux qui ont déjà à affronter la révolution de l’entrée à l’école ! Elle propose alors la présence d’un adulte familier à leurs côtés afin de conforter leur sécurité affective, de créer un climat convivial et de permettre des allers et retours entre l’univers musical des enfants chez eux et les propositions qu’elle leur fait. Cet adulte référent peut être un parent ou un grand-parent. Noémie souhaite cependant que ce soit la même personne qui vienne à chaque fois pour assurer une continuité et permettre une évolution même si, avec cette présence des adultes, « il n’est pas toujours évident de gérer les séances, mais il est essentiel pour les enfants d’être accompagnés dans leur exploration sonore ». Durant ces ateliers, elle propose des chansons, des jeux sonores et vocaux, la découverte de petits instruments. Les adultes voient les enfants jouer et réciproquement. Noémie demande aux parents de participer au même titre que leur enfant et d’intervenir le moins possible, de ne pas chercher à leur « faire faire ». Il arrive que certains parents soient gênés, n’osent pas se lancer, ouvrir des portes qu’ils percevaient fermées jusque-là. Et pourtant leur retour est très positif et la demande en forte augmentation. Noémie donne aujourd’hui des cours d’éveil musical aux enfants de 3 ans, aux 4/5 ans et s’occupe également du jardin musical pour les enfants de 6 ans. Elle connaît et accompagne certains enfants depuis leur plus jeune âge, et la confiance est partagée. Les enfants suivent et répondent aux propositions de Noémie sans hésitation ce qui permet de pousser plus loin les découvertes musicales. « Nous nous sommes apprivoisés comme le Petit Prince avec le renard », aime t-elle à expliquer.
Priorité aux tout-petits
En effet, des huits heures hebdomadaires dans cette école de musique, Noémie Haller en consacre un peu plus de deux aux structures petite enfance de la ville. En pratique, elle passe une matinée par semaine à la Maison de l’enfant Maria-Montessori à la rencontre des enfants accueillis dans les différentes structures ou chez les assistantes maternelles. Chaque groupe d’enfants la retrouve une fois par mois, le mardi, pendant toute l‘année : une fois ce sont les bébés de la crèche collective puis le groupe des enfants de la halte-garderie ; la semaine suivante, ce sont les enfants plus grands puis les « moyens » de la crèche, toujours par petits groupes ; un autre mardi ce sont les groupes d’enfants accueillis par des assistantes maternelles (cinq ou six pas plus, et seulement les volontaires) inscrites au Ram. Enfin la quatrième semaine, elle retrouve un groupe dit spécifique car constitué toujours par le même petit nombre d’enfants, parmi les plus grands, et les professionnelles qui le souhaitent, afin de leur proposer des vrais temps d’exploration sonore et musicale.
Noémie Haller apprécie le travail musical avec les tout-petits parce qu’avec eux, « le contact est direct, il n’existe pas de biais, il n’y a pas de mensonges ». Deux idées lui paraissent importantes dans ses actions : « Partir de ce que fait l’enfant, prolonger et développer ses propositions mais également tester et expérimenter de nouveaux dispositifs. » Ces échanges et ces temps de transmission et de partage avec les enfants lui occasionnent beaucoup d’interrogations. Comment faire pour saisir le sens des regards, des attitudes des bébés ? Comment être sûre que ces moments représentent une source d’expérimentation et d’exploration « juste » pour eux ? Car, pour elle, il est bien question de donner à vivre « une diversité d’expériences qui résonnent chez chacun selon sa sensibilité et sa disponibilité du moment, et que les enfants deviennent de plus en plus avides de propositions nouvelles ».
Transmettre aux professionnelles, une étape indispensable
Quel que soit la séance, les enfants sont accompagnés de leur professionnelle de référence et, en fin d‘animation, Noémie essaie de prendre le temps de partager avec elles leurs observations, comment chacune a ressenti ce moment de sa place, qu’est-ce qui semble avoir été particulièrement important pour tel ou tel enfant ? Noémie tient beaucoup à ces moments de bilan « à chaud » même s’ils font exploser le temps qu’elle est censée passer dans ces structures. Ils lui paraissent indispensables compte tenu de l’âge des enfants et de la nécessité de travailler en harmonie avec l’équipe des lieux qui les accueillent. Ils servent à la fois de point d’appui pour préparer la séance suivante et de transmission de savoir-faire pour que les professionnelles reprennent certaines de ces propositions dans la vie quotidienne avec les enfants !
« Je travaille bien avec elles mais parfois leur dynamisme est presque trop envahissant pour l’enfant, explique-t-elle, J’insiste sur le fait qu’il faut laisser faire l’enfant et ne pas lui imposer trop de choses, sur l’importance de l’écoute, écoute de soi en tant que joueur de musique et écoute de l’enfant. Il est question de jouer “vrai”, sans fausse note dans le respect du rythme de l’enfant dans son exploration. »
Il existe une progression au fil des ateliers. Au début, les professionnelles n’osaient pas se risquer, elles ne se lançaient pas. « La première année, j’étais la musicienne, la technicienne. Je leur disais quoi faire, je les invitais, je leur proposais de faire ! »
Maintenant, les professionnelles des structures, comme les assistantes maternelles, s’autorisent davantage, elles vont plus loin dans le jeu avec l’enfant. Elles hésitent moins à chanter ou à jouer avec leur voix. « On a passé beaucoup d’étapes, c’est un chemin sur lequel nous progressons peu à peu. Le travail avec les adultes prend beaucoup de temps et je ne m’y attendais pas, alors que je savais que c’était long avec les enfants ! Parce que, pour Noémie, « chanter, c’est naturel », elle s’attendait à ce que tous les adultes y arrivent facilement. Elle constate que, si tout le monde écoute de la musique, pour certaines personnes l’expression par la chanson ou les jeux sonores est plus difficile qu’il n’y paraît…
Récemment, un nouveau pas dans le travail avec les professionnelles a été franchi : des séances de musique avec les enfants ont pu être filmées puis regardées et analysées en équipe, avec Noémie, en présence de l’éducatrice et de la directrice. Celles-ci ont été témoins des « effets » que l’intervention de Noémie induisaient dans la structure et que les professionnelles observaient : étonnement, surprise devant la capacité d’écoute mais aussi d’engagement dans le jeu musical de certains enfants, changements de comportement de certains enfants. Par exemple, ce petit garçon très perturbé et perturbateur qui, lors des premières séances quittait le groupe rapidement, fuyant presque Noémie. Peu à peu, il s’est posé, a accepté d’entrer en relation musicalement avec elle puis, un jour, s’est même risqué à jouer tout seul, sur le balafon, une pièce de sa composition dont les spectateurs présents s’accordent à reconnaître la grande musicalité avec beaucoup d’admiration et d’émotion ! Les professionnelles témoignent également de l’intérêt du travail en très petits groupes qui permet aux enfants les plus discrets, les plus en retrait, de se révéler à travers l’expression musicale, d’entrer progressivement en relation avec les autres et de trouver leur place dans la vie quotidienne de la structure.
Pour les professionnelles aussi ce travail d’écoute musicale des enfants et d’échanges autrement que par la parole est enrichissant. Noémie le remarque à la finesse de leurs observations mais également à leur participation active aux réunions qu’elle organise. Elle observe que ces rencontres sont une occasion pour elles d’exprimer ce qu’elles éprouvent elles-mêmes au cours de ces moments musicaux et parfois au-delà, ce qu’elles vivent avec les enfants. Pour expliquer ce qui se construit dans la structure à ce moment là, Noémie a recours à une belle image : « Ce travail contribue à ce que chacun trouve sa place, comme dans un orchestre où chaque musicien cherche à interpréter sa propre partition tout en tenant compte des autres afin que chacun puisse être entendu ! » On imagine le travail que cela suppose dans la durée et la confiance mutuelle.
Se ressourcer
Noémie Haller « avance » donc, selon son propre mot. Elle ne supporte pas de ne pas progresser dans son travail. Elle s’interroge, remet sans cesse en question ses méthodes pour les améliorer. Elle mène parallèlement des projets artistiques et culturels avec d’autres intervenants de l’école de danse, de musique et des arts, comme, par exemple, avec la plasticienne ou ses collègues dumistes mais aussi avec les assistantes maternelles et le personnel des crèches. Cependant, le temps manque ou, devrait-on dire, les temps. Celui consacré à des échanges encore plus développés avec les professionnelles des structures, à la préparation des interventions, à la concertation avec les partenaires au sein de l’école et au-delà et, surtout, le temps de faire de la musique pour elle-même ou se lancer dans ses propres projets artistiques..
Ces temps, avant et après les rencontres, qui sont particulièrement nécessaires pour que les propositions musicales faites aux très jeunes enfants aient un sens, dépassent largement le cadre des deux heures hebdomadaires prévues au planning de l’école. Alors parfois elle hésite à continuer : « Je ne peux effectuer mes recherches que pendant les grandes vacances tant mon emploi du temps est chargé et morcelé le reste de l’année. Je suis sur des enveloppes horaires restreintes et je dois les multiplier pour gagner ma vie. » Et puis elle voudrait pouvoir consacrer plus de temps à la musique, à jouer du violon, à se nourrir elle-même musicalement pour pouvoir donner encore davantage. Sans compter les nouveaux projets qui germent dans son désir d’artiste, comme celui de créer un spectacle pour les très jeunes enfants de Quetigny. Mais ce sera une autre aventure… ν
Des assistantes maternelles
engagées dans un processus de création
Raphaëlle Pernot, Sylvie Champion et Catherine Cordon sont des assistantes maternelles indépendantes depuis respectivement six, dix et treize ans. Quant à Fatima Teixeira, elle l’a été pendant six ans et a choisi en mars 2009 de tenter l’aventure en travaillant en tant qu’assistante maternelle dans le cadre de la crèche familiale gérée par l’Association de gestion et d’animation des crèches de Dijon et de Quetigny, association rattachée à la Confédération syndicale des familles. Ensemble, elles ont créé leur association d’assistantes maternelles, Les Bisoutanou’s.
Tout a commencé en 2006. Un petit noyau d’assistantes maternelles indépendantes fréquentant le Ram décident de faire elles-mêmes le spectacle de Noël pour les enfants parce que, expliquent-elles, « les spectacles que nous avions fait venir les années précédentes nous avaient déçues ». Elles se réunissent en soirée, après le départ des enfants, pour créer leur spectacle, écrire l’histoire, imaginer la mise en scène, faire les costumes… La première année ce sont des ombres chinoises sur des comptines d’enfants. Le retour des parents, invités pour l’occasion, est excellent. C’est un encouragement pour poursuivre l’année suivante avec des marionnettes géantes qui envahissent la scène. Et ainsi de suite chaque année. En 2009, elles franchissent le pas et se mettent elles-mêmes en scène dans un spectacle intitulé La Soupe aux cailloux. Elles expliquent : « On avait chacune un personnage dont on se souvient encore : cochon, loup, mouton… Chacun participait à la confection de la soupe ! D’ailleurs, on en reparle régulièrement ».
Après sept représentations, quatre d’entre elles décident de monter une association loi 1901 qu’elles appellent Les Bisoutanou’s. Aujourd’hui, elles sont six assistantes maternelles, dont cinq indépendantes et une de la crèche familiale associative. L’objet de cette association repose sur l’animation et la création de spectacles pour la petite enfance. Elles souhaitent également « aller à la rencontre des enfants hospitalisés ». En 2009, elles ont présenté La Soupe aux cailloux plusieurs fois au cours de l’année et ont choisi de changer le final lors de chaque représentation selon la saison (Noël, juin, etc.).
Pour tout renseignement
Sylvie Champion
(Voir Ram)
Catherine Cordon
cheercathy21@free.fr
Raphaëlle Pernot
raphaele.pernot@wanadoo.fr
Fatima Teixeira
fatima.teixeira@aliceadsl.fr
Pour tout renseignement
Noémie Haller
École de musique, de danse et des arts 47 bis, rue Vergers
21800 Quetigny
Tél. : 03 80 71 97 80
noe.haller@aliceadsl.fr
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