C’est pouvoir chanter, lire des livres et des images, danser, peindre, dessiner, photographier, filmer… autant que manger, dormir, bouger, toucher, caresser, babiller… Pour rire, jouer, réfléchir, pleurer, parler, lier, délier, découvrir, imaginer, penser, rêver, vivre, cultiver notre être vivant… Pour habiter et se représenter le monde, pour lire le monde, afin de donner sens avec tous ses sens, et cultiver le lien à soi et aux autres.
L’art dans les modes d’accueil de la petite enfance, c’est inclure la rencontre avec des artistes et des créations et favoriser la transmission culturelle, autant à travers des propositions artistiques éphémères (spectacles, résidences d’artistes, créations amateurs avec le soutien d’artistes), que dans le quotidien des journées.
C’est créer des espaces d’accueil pensés pour être vivants, stimulants et qui travaillent chaque jour à lier corps et esprit.
C’est rencontrer l’expérience artistique et le travail de création, c’est expérimenter le passage du plaisir immédiat à la sublimation et favoriser ainsi l’accès au symbolique et à la métaphore.
Qu’il s’agisse de lire, chanter, danser ou être spectateur, ne jamais oublier la triangulation artistique, fondamentale pour un tout-petit. Pour cela, il est évidemment nécessaire de prendre en compte l’adulte et l’enfant dans le quotidien et d’accompagner les professionnels de la petite enfance en soutenant leurs propres capacités à jouer, chanter, lire, danser, conter, parler, rêver.
Les grands « sentiments archaïques » (la peur, l’amour, la perte…) nous traversent dès le début de notre existence. L’art qui permet de les symboliser à travers un langage artistique, intéresse le tout-petit. C’est avec sérieux et appétit qu’il se nourrit de toutes propositions artistiques. L’art, en proposant une rencontre avec soi-même et les autres dans un champ différent de celui de la vie quotidienne, densifie une part intime et personnelle chez chacun de nous. Et l’enfant partage avec l’adulte le besoin de se découvrir et de s’affirmer, d’être en lien avec lui-même. La rencontre avec l’art et la culture fait partie de la construction du sujet dès le plus jeune âge.
Les rencontres autour de propositions artistiques vécues conjointement par l’adulte et l’enfant sont généralement l’occasion d’enrichir leurs liens mutuels. Aux côtés de l’enfant, l’adulte y retrouve des capacités d’émerveillement. En éprouvant ensemble la découverte d’une « œuvre » et le « beau », l’adulte prend le risque de s’émouvoir devant l’enfant, lui dévoilant, à travers sa sensibilité, une part plus intime de son humanité. Tout en restant dans un cadre professionnel, ces temps partagés donnent place à l’histoire singulière de chacun et à la transmission. Ces moments permettent de « parler vrai » autant du côté de l’adulte que de l’enfant qui a besoin de rencontrer un adulte présent et vivant.
Partager une proposition artistique avec un enfant, c’est prendre le temps de vivre une découverte, c’est oser une traversée, prendre le risque de l’inconnu. Quelle qu’en soit la nature (lire ensemble, chanter, danser, peindre, photographier), que ce soit dans la vie de tous les jours ou dans le cadre d’ateliers, l’invitation faite aux enfants est de rencontrer un langage artistique en respectant chaque individu dans son rythme, sa sensibilité, sa curiosité, son désir. De cet évènement « gratuit » et « qui ne sert immédiatement à rien » chacun sort un peu différent. C’est précisément cette gratuité qui permet l’expression de la personnalité et de l’intelligence. Dans cette rencontre, tout individu est considéré comme une personne, quelque soit son âge, sa situation familiale ou ses handicaps. Et nous savons désormais que le tout-petit est une personne dès sa venue au monde.
Restons vigilants afin que ces rencontres ne deviennent pas des propositions didactiques. Dans les premières années de la vie, l’échange autour d’une matière artistique ne doit pas proposer un apprentissage sur une mode scolaire où les enfants seraient conviés à tous faire la même chose, au même moment, avec l’attente d’un résultat prédéfini. Les rencontres proposées sont d’un autre ordre. Elles peuvent paraître informelles et pourtant les petits et les adultes présents apprennent beaucoup !
Pour exister dans leurs dimensions artistiques, ces propositions doivent être portées par l’envie de les partager avec des petits en donnant de la valeur à ce qui s’y crée et s’y ressent avec des adultes désireux de donner du sens à ce qui s’y vit.
Quel que soit son champ d’action, la dimension artistique reliée à la vie quotidienne offre une expérimentation sensible, nourrissant une rencontre avec le monde et soi-même, indispensable à l’épanouissement de l’enfant.
• Agnès Chaumié
Cet article a été rédigé par Agnès Chaumié, musicienne de l’association Un air d’enfance, à la demande d’Enfance et Musique et en concertation avec Cécile Pécondon-Lacroix, plasticienne vidéaste, Dominique Rateau – L’Agence quand les livres relient, Evelyne Resmond-Wenz représentant A.C.C.E.S et ACCES Armor, Laurence Salvadori, danseuse de la Compagnie Ouragane. Il rend compte d’une note de synthèse élaborée
dans le cadre de la mission confiée à Sylviane Giampino, psychanalyste et psychologue par Laurence
Rossignol, Ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes.
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