L’ambiance a changé au sein de la crèche

« Avec le recul, l’ensemble de ces formations a changé l’ambiance au sein de la crèche et facilité la participation des assistantes maternelles aux animations auprès des enfants. Les relations sont plus simples et spontanées avec eux ; dans la chanson ou le conte, l’adulte peut se laisser aller avec l’enfant au rêve et à la poésie ! », constate Anne-Marie Rakotonindrany, ancienne directrice en retraite.

De fait, dans les temps d’accueil collectif comme chez elles, les façons de faire des assistantes maternelles ont changé. Une plus grande attention a été portée aux conditions d’organisation des activités pour que les enfants puissent les vivre pleinement. 

L’installation des bébés est plus adaptée, au sol, avec des jeux à leur portée, dans un espace qui leur est dédié. Il faut dire que la taille de la structure avec ses nombreuses pièces et sa grande salle le permet. Les explorations sonores des enfants, parfois un peu bruyantes, sont moins dérangeantes maintenant qu’elles sont reconnues comme telles. Les assistantes maternelles s’amusent à les détourner quand elles deviennent gênantes pour l’entourage. Elles osent davantage chanter, en français ou dans leur langue maternelle, comme Fernanda Leitao qui chante ou raconte des histoires en portugais, même à la crèche. Maryse Humbert, elle, se laisse guider par les enfants pour choisir les livres lorsqu’elle se rend à la bibliothèque et se surprend elle-même à lire des livres dont « les couvertures sont noires et blanches » ! Avant, elle avait tendance à ne préférer que les livres colorés parce qu’elle se disait que c’était mieux pour les enfants. 

Les parents eux-mêmes s’intéressent aux activités, en discutent avec les assistantes maternelles, leur demandent des paroles de chansons, des références de livres alors qu’au début, ils ont eu du mal à accepter que l’assistante maternelle de leur enfant parte en formation pour apprendre à jouer ou à chanter ! 

Les assistantes maternelles osent plus à la crèche…

Chaque année, la fête de Noël est l’occasion pour quelques assistantes maternelles de préparer un spectacle qui sera joué devant les enfants et leurs parents. Les stages ont contribué à leur donner envie de se lancer. Cette année, le projet de création a été monté en partenariat avec la bibliothèque. L’une d’elles explique : « On s’est inspiré d’un livre qu’on avait choisi en début d’année. Nous avons chanté et joué les personnages du livre. » Pour la préparation, elles se sont retrouvées une fois par semaine, à la crèche, d’octobre à décembre. Avant les stages, seules les éducatrices et la puéricultrice étaient force de proposition mais maintenant, certaines assistantes maternelles osent faire des propositions, se mettre en jeu. Comme le précise Laurence Carrié, « monter un spectacle et se mettre en scène demandent un travail personnel important, mais plusieurs se sont autorisées à le faire après les stages ». D’autres préfèrent agir en coulisse, pour ne pas s’exposer. Il se crée une certaine émulation entre assistantes maternelles. Ce spectacle leur permet d’être regardées autrement par les enfants comme par leurs parents. 

La directrice reconnaît que des erreurs ont été faites dans le passé lorsque, entre professionnelles, elles tâtonnaient pour trouver ce qui conviendrait le mieux aux enfants. « On pensait que c’était bien de faire participer l’enfant lorsque nous montions un spectacle, or on s’est rendu compte qu’il est très difficile pour un tout-petit d’être spectateur et acteur en même temps. L’enfant et l’adulte doivent avoir chacun un rôle précis pour ne pas tout embrouiller. L’adulte aime jouer un personnage, mais pour l’enfant, je ne suis pas sûre que ce soit facile, et c’est même peut-être angoissant. Leur place est plus à regarder et vivre le spectacle avec leurs yeux et leurs oreilles. »

Cette réflexion a permis également de repenser la participation au carnaval : dans le passé, enfants, parents, professionnelles se rassemblaient pour une grande fête mais la directrice et son adjointe ont choisi d’y mettre un terme. Une réflexion a été menée : la question de l’intérêt pour l’enfant d’être ainsi déguisé, mis en scène par les adultes a été posée. Était-ce un spectacle pour les enfants ou pour les adultes ? Viviane Dodin explique : « On s’est demandé ce que cela représentait pour les enfants. Maintenant on laisse le choix aux plus grands de se déguiser ou non, et avec un déguisement apporté de chez eux s’ils le veulent. On a décidé de participer à ce carnaval par petits groupes et non plus tous ensemble. Il a fallu expliquer aux parents et aux professionnelles pourquoi nous voulions arrêter, ça n’a pas été facile ! »

… et chez elles aussi

Avant les stages, à l’occasion desquels elles ont découvert des facettes cachées d’elles-mêmes, les assistantes maternelles avaient peur de mal faire lorsqu’elles se lançaient dans l’inconnu avec les enfants. Aujourd’hui, elles ont la sensation de partager avec eux plus de plaisir, de moments précieux, de rêves : jouer ou écouter des histoires sur un tapis dans un petit coin aménagé pour l’occasion chez l’une, faire la cuisine avec une autre, remplir des coussins de mousse et s’amuser à en mettre partout, chanter des chansons ou jouer d’un instrument de musique fabriqué avec des objets du quotidien… Les assistantes maternelles prennent plaisir à entrer dans l’imaginaire des enfants parce que cela leur donne des ailes pour inventer de nouvelles activités. Elles n’en oublient pas pour autant qu’elles sont professionnelles et que les parents comme les responsables de la crèche comptent sur leur sérieux, mais elles s’autorisent plus de liberté en jouant et en créant avec les enfants. De son coté, la directrice sait qu’elle peut leur faire confiance.

Fernanda Leitao se souvient : « On avait peur de mal faire donc on restreignait nos activités avec les enfants. On a gagné de la liberté dans les jeux, dans la manière de vivre des moments avec les enfants. Chez moi, par exemple, ils jouent avec des bouteilles en plastique, des instruments inventés, des pots de yaourt… Les jouets ne sont pas toujours des jouets à proprement parlé ! » ν