Gennevilliers, une ville, un festival

Le Pôle Médiation et Saison Jeune Public déploie sur son territoire une politique d’action culturelle résolument tournée vers les habitants.

Aux portes de Paris, logée dans l’une des boucles de la Seine, Gennevilliers est une commune de près de 50 000 habitants, membre depuis 2016 de la métropole du Grand Paris (MGP). Cette ville des Hauts-de-Seine demeure le premier port fluvial français et d’Île-de-France. Patrice Leclerc en est le maire depuis 2014, ce qui favorise une politique dans la durée et des projets réfléchis sur le moyen terme. La volonté de maintenir un taux important de logements sociaux (57%), côtoie le choix de rénovation de l’habitat urbain, avec notamment la création de l’éco quartier Chandon République. 

La Direction de la culture et de la jeunesse de Gennevilliers a bâti au fil des saisons une programmation de spectacles, concerts et expositions en direction du jeune et très jeune public, avec des propositions très suivies notamment sur le temps scolaire, de la maternelle au lycée. De nombreuses structures de la ville collaborent avec le Pôle Médiation et Saison Jeune Public et confirment l’implication des acteurs du territoire : le T2G Théâtre de Gennevilliers, le réseau des médiathèques, le Conservatoire Edgar Varèse, le Tamanoir, le cinéma Jean Vigo, l’École municipale des Beaux-Arts/galerie Édouard Manet.

L’ample cahier des charges souligne la volonté municipale d’identifier les besoins et de construire des projets culturels fédérateurs. Chaque structure affirme son identité culturelle tout en collaborant à une offre pour les familles et leurs enfants. Une convention signée avec l’Éducation nationale, Académie de Versailles, vient parachever la structuration du projet d’éducation artistique et culturelle et encadrer la volonté commune.

Le partenariat avec l’association Enfance et Musique s’inscrit depuis plus de 15 ans dans cette dynamique vivante de collaboration transversale entre les multiples acteurs de l’éducation et de la culture œuvrant en direction des enfants et des familles. 

UNE VISION GLOBALE DU TERRITOIRE

Le Pôle Médiation et Saison Jeune Public propose avec les partenaires de la Ville des spectacles en salle et in situ, des ateliers, des parcours du spectateur, des résidences d’artistes. « Au cœur de toutes nos propositions, se trouve une réflexion sur le rapport du jeune spectateur à la découverte des arts et de la culture. À nous d’imaginer des formes variées de sensibilisation au spectacle vivant et à différentes formes d’art ». Géraldine Salle, responsable du Pôle Médiation, se veut garante d’une vision globale d’un territoire et du maillage qu’il est souhaitable de tisser entre les services et les structures culturelles. 

« Sous l’égide du Pôle, nous avons imaginé des objets communs qui permettraient d’investir les temps périscolaires au même titre que les temps scolaires et extrascolaires ou familiaux. Les NAP¹ – nouvelles activités périscolaires – mobilisent une vingtaine d’intervenants culturels ; recentrés sur la pause méridienne et le mercredi matin depuis la semaine des quatre jours, ils font l’objet d’une grande attention et touchent les enfants de grandes sections de maternelles au CM2 inscrits à la restauration scolaire et /ou le mercredi à l’accueil de loisirs, soit près de 70% des enfants scolarisés. Ce temps périscolaire est en cours de réflexion en vue de lui donner une dimension plus proche des préoccupations éducatives attendues ». 

Le Passeport d’éveil culturel² s’adresse spécifiquement aux enfants inscrits en grande section de maternelle : le temps de dix ateliers et d’une sortie familiale lors de la saison culturelle, l’enfant est sensibilisé à différentes pratiques artistiques.

DE LA CRÈCHE AU LYCÉE

Avec pour ambition que chaque enfant et chaque année pendant sa scolarité puisse assister à un spectacle et participer à un atelier, le Pôle Médiation affine une cartographie la plus précise possible du jeune public destinataire. Toutes les crèches bénéficient désormais de deux spectacles chaque année et à minima d’un atelier. L’année 2021-2022, toutes les 125 classes de maternelles ont été touchées par un spectacle en salle et un atelier ; elles ont aussi bénéficié du dispositif du PLE (Prix littéraire des enfants), la majorité ont assisté à un spectacle « In Situ ». Une offre diversifiée qui tend et arrive presque au 100% culturel en EAC pour les maternelles. L’objectif est d’élargir l’offre pour les classes d’élémentaires, voire les collèges et le lycée.

Le choix de représentations In Situ souligne « la volonté d’aller dans les lieux de vie » précise Géraldine Salle, « notamment pour les plus petits. Nous cherchons d’abord à aller à la rencontre de l’enfant, sans les codes d’une salle de spectacle ». Un suivi s’installe, comme en témoigne la collaboration avec l’ensemble musical 2e2m³ pour les plus petits. Boule de suif, inspiré par la nouvelle de Maupassant, est spectacle de la compagnie Les moutons noirs ; il sera joué dans le cadre du Festival dans un collège. 

L’action culturelle pour les moins de trois ans s’inscrit dans le dispositif de la DRAC Île-de-France, Premiers regards, premiers pas⁴. Cette déclinaison régionale du protocole sur L’Éveil artistique et culturel des jeunes enfants signé le 20 mars 2017 est mise en œuvre depuis l’été 2017 en développant un volet « petite enfance » dans la politique d’éducation artistique et culturelle. 

Les partenariats avec le réseau Courte échelle⁵ et les JM France⁶ viennent enrichir la programmation. 

Le Pôle Médiation et Saison Jeune Public accueille chaque saison plusieurs compagnies en résidence. Sept compagnies s’installent sur le territoire cette année dont cinq en crèches. 

Géraldine Salle précise que « le choix s’effectue en fonction des liens déjà créés avec les artistes. La durée est souple en fonction des besoins, le temps de résidence étant choisi en continu pendant une ou deux semaines ou en plusieurs périodes, selon des modalités concertées entre les artistes et les équipes des lieux d’accueil ».

LE FESTIVAL JEUNE ET TRÈS JEUNE PUBLIC

En février 2023 se déroulera la sixième édition du Festival jeune et très jeune public. 45 spectacles (29 pour le très jeune public), dont 25 créations pour 95 représentations du 1^er au 12 février. Venus de France, Belgique, Suisse ou encore du Canada et du Liban, les artistes prendront possession de la ville, pour le plus grand bonheur des familles, des professionnels et des lieux culturels associés. Ce festival est le reflet d’une histoire partagée avec Enfance et Musique, co-fondateur de l’évènement avec la ville de Gennevilliers en 2013. Auparavant modestement affiché comme des « Présentations » de spectacles très jeune public aux professionnels de la petite enfance et de la culture d’Île-de-France, le festival a peu à peu mobilisé de nombreux partenaires. Le croisement des réseaux de la ville qui sollicite les compagnies ayant traversé le territoire et le réseau national d’Enfance et Musique a enrichi chaque édition. Géraldine Salle réalise la programmation avec Wanda Sobczak, Responsable secteur spectacles d’Enfance et Musique. 

La Biennale s’appuie donc sur une histoire comme le précise Géraldine Salle : « nous sommes reliés par une histoire commune ». Wanda Sobczak complète en soulignant « la confiance mutuelle s’est consolidée d’éditions en éditions. Gennevilliers est une ville où l’éducation populaire et une vision politique humaniste sont des lignes de force dans lesquelles Enfance et Musique retrouve toutes ses convictions. Le festival est aussi un espace d’expérimentations, d’ouverture à des écritures et de réflexion sur le spectacle très jeune public ».

Ce duo complice est particulièrement attaché à l’accueil des familles : 30 représentations tout public sont ainsi programmées à leur intention. « Il est également important de veiller à la composition des jauges » précise Wanda Sobczak. « Chaque public est attendu dans le respect de l’autre avec une parité adultes/enfants ; on ne touche pas à cet équilibre ».

Au programme également une journée professionnelle le 9 février, un speed meeting, des présentations de projets et créations en cours, un tapis comptines pour les familles…

De nouvelles initiatives voient le jour comme l’appel aux bénévoles et la mise en place d’un collectif, géré par Sylvie Morel, ancienne directrice de maternelle qui a accueilli nombre de représentations lors des éditions précédentes. D’autres établissements du second degré élargissent la palette de rayonnement de l’action culturelle. Un prix des adolescents viendra couronner leurs parcours de spectateurs.

À l’automne 2023, l’ancienne Maison du Développement Culturel deviendra l’Espace Saâd Abssi afin d’accueillir, entre autres, le Pôle Médiation et Saison Jeune Public et ses futurs projets. Un nouveau chapitre va s’ouvrir, il n’en sera pas moins dense que les autres !

• Hélène Kœmpgen