Comme un souffle, Cie La Croisée des Chemins

Des mots qui résonnent comme une bouffée d’air frais. Un vent de liberté souffle sur cette nouvelle création. 

Après Je suis là et Bao Bei, Delphine Sénard nous livre un troisième opus qui se lit comme une ode à la liberté et célèbre la folle énergie de l’enfance. Les tout-petits seraient-ils donc comme le vent, ivres de leurs courses folles et spontanément prêts à prendre tous les risques ? À l’intérieur d’un cercle originel, à l’image du théâtre antique, les enfants et les artistes partagent l’espace scénique. Autour, en proximité, les adultes partagent l’émotion du spectacle, témoins de ce qui se joue, dans une représentation « à réactions libres », principe cher à Delphine Sénard, danseuse et chorégraphe. Le geste de l’artiste croise l’exploration du tout-petit qui se glisse dans le jeu, pour une fête sans contrainte. 

PRÉSERVER UNE PART DE LIBERTÉ

Dans un périmètre précis et un cadre réfléchi, les enfants sont libres d’entrer en dialogue avec les artistes. Delphine Sénard aborde ses dernières semaines de travail avant la création qui aura lieu en mars 2022. Comme un souffle est dédié aux enfants des lieux d’accueil, des très petites et petites sections de maternelle et à tous les adultes qui les accompagnent. La proposition destinée aux enfants plus grands et au tout public, Comme le Vent, pourra quant à elle se jouer dès 2023, au plateau ou en extérieur.

« Pour cette fête de l’énergie j’ai souhaité convoquer les danses et musiques traditionnelles » commente Delphine Sénard. La musicienne danse, la danseuse chante, les percussions corporelles rythment une alchimie entre un environnement sonore en direct et des musiques diffusées. « Après avoir observé les enfants, je me suis demandé pourquoi leur venait cet irrépressible besoin de mouvement. J’avais en mémoire des échanges avec Véronique His¹ sur le thème de la course, à perdre haleine et sans fin… J’ai assisté au festival Enfance et Nature² à Strasbourg évoquant le risque en nature, le jeu à risque… Je me suis alors questionnée sur la part de liberté enlevée aux enfants, leur envie éperdue de courir, leur énergie, les priorités incessantes de sécurité ». Delphine Sénard a effectué de nombreuses recherches préparatoires, analysé les postures du corps entre rituel ancestral et plaisir de la course du tout-petit, elle a comparé des photos anciennes d’aires de jeu et leurs versions contemporaines, sans risque et totalement aseptisées… Alors le projet a pris corps, entre dimensions symboliques et physiques.

OSER LA PRISE DE RISQUE

Le pari était de s’adapter aux contraintes d’accueil du spectacle et au désir de créer un espace de liberté, pour les artistes et les enfants, libres de s’inscrire dans ce qui s’écrivait ensemble, dans un moment de partage intense.

Comme un souffle offre un cadre précis avec l’intention d’y laisser l’enfant libre. Ce serait presque un principe général d’éducation ! Dans une société qui réduit les espaces de l’imaginaire et joue le tout sécuritaire, le choix de la compagnie La Croisée des Chemins va plus loin qu’une proposition de liberté momentanée ; elle invite à réfléchir aux espaces de liberté offerts à l’enfant, à la prise de risque consciemment choisie, loin des écrans qui sécurisent les adultes parce que l’enfant est « occupé ».

Oser la chute, accepter de courir, tomber, se relever, et reprendre sa course. Quelle place les adultes acceptent-ils de laisser à l’expression de l’enfant sans chercher à canaliser son énergie, sans chercher à se rassurer, sans vouloir l’enfermer dans un parcours dominé par le multimédia omniprésent ?

Le spectacle de Delphine Sénart va bien au-delà du mouvement libre, il pose la question des espaces de liberté dans la société contemporaine. Et l’exposition qui accompagne le spectacle résume bien le propos Laissez-les grimper !

• HK