Cabanes au-dehors

Un duo de bâtisseuses de l’association Dreamcatchers s’installe pour attraper les rêves et construire un chez-soi éphémère dans l’espace public.

Se mettre au centre de l’expérience sensible et transposer une pièce dans des espaces extérieurs, nous délestant de contraintes techniques pour gommer tous les filtres qui entravent le contact avec la matière ». Coline Duval décrit le principe qui l’a conduite à revisiter le spectacle Cabane, créé pour le plateau en 2020 lors du Tout-petit festival. « Aller au-dehors, c’est mettre en jeu des pratiques et un engagement du corps dans des espaces qui ne lui sont pas forcément dédiés. Ce franchissement est une invitation à poursuivre la rencontre vers le dehors, avec tout ce que cela induit de vulnérabilité ». La nouvelle création pour l’enfance et l’espace public de la compagnie Dreamcatchers est conçue pour les enfants de la naissance à 6 ans. Une version pour les plus grands est également proposée. « S’installer aux abords d’une forêt, dans le jardin de la crèche, vers la plage, sur le terre-plein d’un quartier… c’est convier le très jeune enfant et les adultes qui l’accompagnent à redécouvrir des paysages et des lieux où déployer leurs imaginaires ». L’espace public s’habille de branches et de ficelles, il devient terrain de jeu, les artistes s’insèrent dans une multi sensorialité toujours renouvelée, « comme le travail du danseur ».

CHEMINS DE RECHERCHE

La compagnie Dreamcatchers développe des projets artistiques et culturels et une approche de la danse contemporaine avec la préoccupation d’impliquer étroitement ses intervenants et les professionnels en milieu scolaire, associatif, petite enfance… Attraper des rêves ! Ce nom est déjà tout un programme ! Les actions ciblées sont construites avec les interlocuteurs, des axes précis de recherche sont choisis en concertation afin de donner encore plus de sens à l’expérience. 

Coline Duval s’est formée à la danse contemporaine au sein du programme «ex.e.r.ce» du Centre Chorégraphique National de Montpellier, alors dirigé par Mathilde Monnier. « La génération de chorégraphes et d’artistes de l’époque a bousculé ma pratique académique et technique de la danse pour ouvrir des questionnements qui se poursuivent encore aujourd’hui. » Depuis 2011 elle poursuit son travail au sein de Dreamcatchers. Après de nombreux voyages, une formation à la pédagogie Maria Montessori, la mise en œuvre d’une classe à la maison avec ses enfants, elle poursuit son objectif de transmission et de partage de la danse contemporaine dans « ce non verbal qui interroge le rapport à la construction du corps et de l’espace ». Coline Duval insiste sur l’objectif de « transmettre quelque chose de nourricier, issu d’un aller-retour entre l’immersion avec la petite enfance et le travail de studio ». 

L’ÉVOLUTION D’UNE CRÉATION

Élaboré dès 2018, le projet Cabane est une « exploration chorégraphique où le corps est lui-même notre cabane, notre premier lieu d’habitation ». Comme l’espace qui se découvre et se transforme, le projet se construit « dans un rituel d’habitation éco poétique pour devenir terrain de jeu à visiter, en douceur ». 

Les artistes rencontrent les tout-petits à chaque étape de cette recherche-création. Parallèlement à une résidence longue (de septembre 2023 à juillet 2024) à la crèche Colette de Rennes, Coline Duval et sa complice Albane Aubry amorcent trois semaines de résidences au domaine départemental de Kerguehennec en mars 2024. « Les résidences auprès des enfants nous permettent de remettre en jeu notre matériel scénographique, d’envisager des prolongements, des adaptations, de tester notre mise en jeu » souligne Coline Duval. Des entretiens sont menés en début et fin de résidence avec un parent et un professionnel de l’enfance (et un enfant d’au moins trois ans).

Dans Cabanes au-dehors, le duo de bâtisseuses accueille un groupe de tout-petits habitants aux compétences multiples. « Les bébés sont aussi des vocalistes ! Nous avons choisi d’inclure la voix dans notre recherche avec le souhait de mêler des chansons d’Albane aux sons de l’environnement. Dans la cabane qui est un lieu à investir, le son accompagne le mouvement ». 

Après une dizaine de présentations de maquette, la création de Cabanes au-dehors est annoncée pour octobre 2024, aboutissement d’un long parcours pour « habiter un espace choisi, existant avant et après nous. Nous sommes des résonateurs du vivant et du lieu ». 

Et déjà se profile pour 2024-2025 un nouveau chantier de prospection : Gros Câlins…

• HK