Balades sensibles

L’équipe du MAC VAL a imaginé des promenades chorégraphiées conçues à l’adresse des tout-petits et de leurs parents. Le prisme de la danse contemporaine cultive une approche ludique et sensible.

Soutenu depuis son ouverture en 2005 par le département du Val-de-Marne, le MAC VAL est exclusivement consacré à la scène artistique en France. 

Découvrir l’art contemporain dans ce bâtiment inscrit dans le quotidien des habitants de Vitry-sur-Seine peut-il nourrir la mise en relation d’un parent avec son enfant dans un lien sensible partagé ? C’est le pari d’une compagnie chorégraphique, la Compagnie 2minimum, menée par Mélanie Perrier que le MAC VAL a sollicitée pour construire des balades pour les tout-petits, de la naissance à 3 ans, dans le cadre de son opération intitulée La Fabrique du sensible. Tout est extrêmement réfléchi dans ces parcours proposés par la compagnie : les capacités psychomotrices du très jeune public sont prises en considération avec finesse et les balades sont divisées en trois catégories : avant la marche, de la marche au langage et avant l’entrée en maternelle. La composition des groupes a été pensée, avec un seul parent par enfant, afin de former sept binômes impliqués dans chaque parcours… Enfin le choix des œuvres parmi les collections du musée a été réalisé par les trois danseuses, Bérengère Roussel, Marie Barbotin et Mélanie Perrier ; chacune est autrice et interprète de sa version prenant en compte l’espace et le temps. Cinq mois d’un travail de création dans les lieux ont été nécessaires pour concevoir ces promenades tantôt silencieuses, tantôt en musique. Toutes trois ont accumulé une expérience avec la petite enfance, en intervenant dans des crèches ou auprès du jeune public en milieu scolaire. 

Avec ces Balades sensibles qui sont des propositions artistiques, elles font bouger les lignes, comme l’explique Mélanie Perrier : « nous faisons groupe et le parent n’est pas un accompagnateur, il participe activement au même titre que son enfant. C’est une partition générale, ni visite, ni atelier mais une troisième typologie, qui passe par le corps pour aborder l’œuvre.

LA RELATION À L’ART

Chacun l’active à son rythme et nous sommes responsables de la mobilité ou des temps calmes ». À ce titre, l’équipe du musée est présente grâce à un(e) complice qui va être garant du groupe et participe à la répétition générale des promenades. Il n’est pas là pour interdire mais pour faciliter l’expérience et veiller à son bon déroulement. La partie sonore, musiques ou bruits du vent, de bourdons, de la mer, intervient comme soutien ou pour rythmer les temps du parcours. « L’art contemporain fait appel à la pluralité des imaginaires » précise Mélanie Perrier. Chaque balade est donc différente ; elle sollicite des capacités diverses sans mettre le tout-petit en difficulté et permet au parent d’observer la réaction de son enfant et non de choisir en fonction d’une catégorie d’âge, souvent un peu arbitraire. 

Anne-Sophie Grassin, responsable de l’action culturelle et du développement des publics au MAC VAL précise : « nous avons fait appel à cette compagnie de danse parce qu’elle développe un travail sur le sensible et a élaboré une réflexion très aboutie sur la petite enfance ; cela correspond parfaitement à l’un de nos grands axes, La Fabrique du sensible et nous permet d’augmenter cette offre avec d’autres paroles que celles que nous élaborons en interne. Leur vision nous a permis de développer ce format et de trouver une médiation qui engage à la fois le parent et l’enfant. Faire intervenir le corps des danseuses pour trouver un lien avec ce qui relie le bébé au monde et aux autres, c’est-à-dire son corps, est primordial et participe du rôle que les musées ont à jouer, redonner du sens à toutes les étapes de nos vies ». 

L’engagement étroit entre le musée qui accueille et les artistes, une vision élaborée de ce qu’est la petite enfance dans sa diversité, une prise en considération de l’adulte accompagnateur comme partie prenante de la création, tous ces facteurs font de ces Balades sensibles du MAC VAL des expériences qui bénéficient aussi bien au public qu’aux institutions, en faisant évoluer peu à peu les perceptions des enfants et de la relation à l’art…

• Dominique Boutel